Regarder. Jouer. Avec une soixantaine de jeux présentés, dont la moitié jouables, l’exposition GAME invite les visiteurs à remonter le temps pour découvrir les évolutions et les révolutions d’un secteur qui génère aujourd’hui des dizaines de milliards d’euros chaque année sur toute la planète. Le jeu vidéo se regarde désormais autant qu’il se joue, mais
comment est-il entré dans notre quotidien ? Comment en est-on arrivé à le consommer sans même une manette à la main ? C’est ce chemin qu’emprunteront les visiteurs dans un décor empreint de l’univers visuel et plastique du jeu vidéo.
Confiée à Jean Zeid, journaliste spécialisé, l’exposition propose un dialogue entre générations. Les plus jeunes peuvent ainsi expliquer « leur » jeu vidéo aux parents et ces derniers joueront avec eux aux souvenirs ludiques de leur enfance : bornes d’arcades d’antan avec par exemple la machine OutRun en version Deluxe, consoles de salon de différentes
époques, Game Boy géante interactive, figurines, espace dédié à l’esport, histoire des youtubeurs, réalité virtuelle avec une balade dans le ciel de Paris, etc. De nos jours jusqu’aux années 1950, à chacune de ses mutations, le jeu vidéo semble revenir à ses origines : sa volonté de faire spectacle pour rapprocher toujours plus les innovations du quotidien.
Un jeu vidéo qui veut désormais tout faire : du cinéma, de la télé, du sport, du beau et pourquoi pas, éduquer ou soigner. Demain, il promet encore des mondes nouveaux. Ses mille visages sont à voir dans l’exposition GAME !
LE PARCOURS DE VISITE EN TROIS ÉTAPES
Le parcours se déroule sur trois espaces avec une chronologie à rebours, de la réalité virtuelle à la préhistoire du jeu vidéo, en passant du côté des mascottes de cette industrie ou de quelques bornes emblématiques de l’âge d’or des salles d’arcades, une balade composée d’une succession de thématiques pour jouer et comprendre le phénomène dans toutes ses composantes, artistique, ludique, sociétale ou industrielle.
L’exposition s’ouvre ainsi par un premier espace dédié à ce jeu vidéo qui se regarde et notamment l’histoire des youtubeurs et de ce qu’on appelle le Let’s Play, ces parties commentées qui ont acquis un large succès d’audience sur les plateformes de vidéos en ligne. Dès l’entrée, c’est un écran géant qui propose une version jouable de Uncharted 4 : A Thief’s End, une aventure visuellement impressionnante, le premier jeu Instagram dont on a envie de photographier tous les décors, beau comme un film hollywoodien. L’explosion des jeux mobiles est aussi évoquée avec une Game Boy reconstituée et un Tetris jouable qui n’a pas pris une ride. Et puis, quatre versions jouables de la simulation de football FIFA, de 1993 à 2016, dévoilent une caractéristique inédite dans l’histoire de ce média : il peut marquer le passage du temps. Les quatre épisodes canoniques de cette série sont présentés comme autant de marqueurs temporels témoignant de l’évolution des images et techniques.
D’ailleurs, en une vingtaine d’années, la modélisation des personnages et des décors en trois dimensions a évolué à une vitesse étourdissante, s’approchant toujours plus du réalisme. Pour décrypter ces avancées technologiques, l’éditeur Ubisoft s’est appuyé sur le héros de sa récente production Watch_Dogs 2, en produisant pour l’exposition cinq statuettes saisies à différentes époques visuelles. Mais le jeu vidéo n’a pas attendu les youtubeurs ou les esportifs pour se regarder, les salles d’arcades et ses machines au design parfois spectaculaire avaient déjà montré la voie. Ainsi, une borne Deluxe du jeu OutRun du japonais Yu - Suzuki est présentée en version jouable avec son levier de vitesse, ses véritables pédales au pied et son autoradio avec quatre pistes au choix. Et si la salle d’arcades est un théâtre, c’est parce qu’elle invite aussi les joueurs sur des scènes imaginaires.
L’impressionnante borne Dance Dance Revolution convie le public à mêler danse et rythme sur une piste interactive et pourquoi pas jouer en freestyling c’est-à-dire en créant son propre style. Le jeu vidéo, est-ce de l’art ? La question est inlassablement répétée au fil des années et des articles, études, colloques ou tribunes. Différents camps s’opposent. Pour les uns, puisqu’il y a des artistes derrière la production des jeux, il y a des oeuvres. Pour d’autres, ce n’est qu’une vaine recherche d’anoblissement pour une sous-culture qui le restera. Une quinzaine de reproductions de jeux emblématiques de l’histoire vidéoludique questionneront le visiteur sur ce point. Enfin, toujours à ce même niveau, un mur de 18 portraits de personnalités internationales parmi les plus importants montre les visages de celles et ceux qui ont façonné cette histoire vidéoludique, des hommes et des femmes souvent méconnus du grand public et qui ont donné vie à ce média depuis plus de cinquante ans. Amy Hennig, auteure de la saga Uncharted, Michel Ancel, le « père » de Rayman et des Lapins crétins, Shigeru Miyamoto, qui donne vie à Mario dans Donkey Kong, ou encore Hideo Kojima, l’une des rares superstars du secteur qui a créé Metal Gear Solid.
La deuxième partie de l’exposition se situe à l’étage et est entièrement jouable. Il s’agit d’un retour interactif vers le passé pour mieux saisir le présent. Un voyage qui débute dans la préhistoire vidéoludique, dans ces laboratoires de scientifiques où fut inventé le jeu vidéo il y a plus d’un demi-siècle. Cette autre histoire, celle des mathématiciens, des physiciens, des ingénieurs et des chercheurs, sera proposée pour la première fois lors d’une exposition à travers quatre jeux, OXO, Tennis for two, Spacewar! et Ping-pong. Le prototype de la première console de salon de l’histoire, la Brown Box sera également présenté à côté d’une borne cocktail de Pong jouable à deux.
Pour conclure ces premiers âges vidéoludiques, deux thèmes. Le premier se situe immédiatement après Pong avec quatre jeux inspirés de sagas cinématographiques comme « Flash Gordon », « Star Trek » et surtout « Star Wars » : Space Invaders, Asteroids, Missile Command et Defender. Après cette conquête de l’espace, une large zone compile les mascottes qui ont marqué cette histoire, de Pac-Man à Ezio Auditore d’Assassin’s Creed II en passant par Mario ou Rayman. Une déambulation qui passe enfin par l’histoire des manettes et des accessoires, sans oublier une nouvelle branche du jeu vidéo, celle du jouet vidéo initiée par les Skylanders en 2011.
La dernière partie, au sous-sol, propose au grand public plusieurs expériences, notamment celle dédiée à la réalité virtuelle. Dans le ciel de Paris, le jeu Eagle Flight prend pour décor une capitale délaissée par ses habitants et abandonnée à Dame Nature. Un plaisir aérien qui mêle sensations parfois fortes, parfois douces, selon les styles. Le serious game, ou « jeu sérieux », a aussi son espace avec trois programmes informatiques inspirés par les jeux vidéo à des fins autres que le simple divertissement : Minecraft Education, J’aime les patates et en avant-première et en exclusivité Smokitten, un jeu qui propose tout simplement d’arrêter la cigarette.
Une dernière pièce évoque les relations orageuses entre le jeu vidéo et la télévision à l’aide d’archives de l’INA souvent savoureuses. Enfin, les publicités - parfois tapageuses, sexistes, grossièrement provocatrices ou dans l’air de leur temps, empruntes d’autodérision - accompagnent avec humour ce voyage dans le temps.
Comment et quand s'y rendre ?
Espace Fondation EDF
6, rue Récamier 75007 Paris
M° : Sèvres-Babylone
Entrée libre, du mardi au dimanche
12h-19h (sauf jours fériés)