Déclaration relative à l’intégration du jeu vidéo dans la liste CIM-11 de l’OMS

Lundi 18 juin 2018

Les associations représentatives des éditeurs et développeurs de jeux vidéo du monde entier souhaitent exprimer leur inquiétude face à la publication à venir de la liste CIM-11 de l’OMS : 

« Le jeu vidéo, indépendamment du genre, de l’appareil ou de la plate-forme utilisés, est pratiqué, de manière raisonnable et en toute sécurité, par plus de deux milliards d’individus à travers le monde. Ses valeurs éducatives, thérapeutiques et récréatives sont fondées et internationalement reconnues.

Par conséquent, nous nous inquiétons de constater que le terme « trouble du jeu vidéo » est encore présent dans la dernière version de la CIM-11 de l’OMS, et ce, malgré une forte opposition de la part des communautés médicales et scientifiques. Les raisons de cette inclusion sont toujours grandement contestées et peu concluantes. Nous espérons que l’OMS voudra bien reconsidérer les preuves grandissantes qui lui sont présentées avant de soumettre l’intégration du « trouble du jeu vidéo » dans la version finale de la CIM-11 qui doit être validée l’année prochaine.

Nous savons que l’industrie et l’ensemble de son écosystème à travers le monde continueront à faire entendre leur voix pour s’opposer à cette initiative. Nous encourageons l’OMS à ne pas prendre des mesures qui engendreraient des implications injustifiées de la part des systèmes de santé nationaux, à travers le monde. »

Contexte de la CIM–11 de l’OMS : 

1. Qu’est-ce que la liste CIM–11 ? 

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) réexamine actuellement sa liste de classification internationale des maladies (CIM), largement utilisée comme un manuel par les praticiens, mais surtout, appliquée aux politiques de santé de nombreux pays. 
L’ébauche actuelle de ce document envisage d’ajouter la pratique du jeu vidéo dans la section traitant des « troubles dus à un comportement de dépendance » (catégorie 06) qui évoque également des maladies liées à l’addiction à l’alcool, aux drogues et aux jeux d’argent.  La version bêta de la CIM-11 est disponible à l’adresse suivante : http://bit.ly/2laaspl

2. La CIM–11 fera-t-elle l’objet d’une approbation officielle ou sera-t-elle simplement « publiée » ? 

La liste CIM mise à jour devrait être publiée en juin 2018 et ouverte à la consultation avant approbation formelle de l’Assemblée générale de l’OMS en mai 2019. 

3. Pourquoi y a-t-il un tel débat autour de l’intégration du jeu vidéo dans cette liste ? 

Il existe un vif désaccord parmi les experts sur la pertinence de l’intégration des jeux vidéo dans la CIM-11. Le sujet a longuement été débattu depuis 2016, année durant laquelle 36 spécialistes internationaux de la santé mentale, professionnels des sciences sociales, scientifiques et académiciens travaillant dans des centres de recherche et des universités, comme l’université d’Oxford, l’université John Hopkins, l’université de Stockholm et l’université de Sydney, toutes et tous renommés et respectés, se sont opposés à cette intégration dans un document en accès libre.  

Deux ans plus tard, en mars 2018, les mêmes scientifiques réitéraient leur opposition suite au manque de reconnaissance de l’OMS dans un second document libre publié dans le Journal of Behavioral Addictions. Le document met en avant la pauvreté des preuves utilisées, soulignant que « la qualité de la démonstration et de la pertinence clinique [d’une telle intégration] devraient être particulièrement élevées en raison des risques réels d’abus de diagnostics ».  ‘A Weak Scientific Basis for Gaming Disorder: Let us err on the side of caution’.

Points de vue des médecins : En mai 2013, l’American Psychiatric Association (APA) a proposé des critères concernant l’addiction aux jeux vidéo dans la 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux et a conclu à l’absence de preuves suffisantes justifiant l’inclusion du trouble du jeu vidéo parmi les troubles mentaux reconnus.[4] Néanmoins, les critères proposés pour le « trouble du jeu vidéo en ligne » ont été intégrés à une section intitulée « Maladies à soumettre à un examen approfondi ».  Jusqu’à présent, cet examen n’a toujours pas été programmé. De nombreux articles universitaires et une vaste recherche, à la fois en faveur et contre la formalisation des comportements problématiques de jeu, ont ensuite fait leur apparition.

En mars 2018, la Society for Media Psychology  & Technology (société de psychologie et de technologie des médias), division 46 de l’American Psychological Association a demandé à l’OMS de ne pas inclure la dépendance aux jeux vidéo dans la CIM-11.  Lien : https://bit.ly/2GuzN9X

4. Les jeux vidéo sont appréciés pour leurs valeurs récréative, éducative et thérapeutique 

Les jeux vidéo sont appréciés dans le monde entier pour leurs valeurs récréative, éducative et thérapeutique.  Cette dernière s’est d’ailleurs fortement imposée au sein de notre société. Elle est à l’origine de nombreuses innovations dans le domaine des traitements médicaux, notamment destinés aux troubles mentaux, mais aussi pour de nombreuses autres affections :  https://www.theguardian.com/games/2018/jun/06/before-i-forget-early-onset-dementia-video-game 
La valeur éducative des jeux vidéo n’est plus à prouver. Les jeux vidéo développent la réflexion stratégique et les instituteurs sont toujours plus nombreux à les introduire dans les salles de classe pour améliorer l’enseignement, grâce, par exemple, à la version éducative de Minecraft qui permet de créer des ateliers d’initiation aux mathématiques, aux langues et aux sciences.  D’autres jeux, tels que les Discovery Tours d’Assassin’s Creed Origin’s aident les enseignants à faire revivre l’histoire de la Grèce antique au cœur des salles de classe grâce aux visites virtuelles de monuments et de lieux historiques. 
En Europe, environ 50 % de la population joue aux jeux vidéo pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus. L’inclusion de la pratique du jeu vidéo dans la catégorie des maladies mentales et des dépendances de la CIM-11 provoquerait une panique morale et entraînerait des abus de diagnostics, car elle ne serait pas fondée sur un nombre élevé de preuves, comme l’exige la formalisation de toute autre forme de désordre.

La Brazilian Union of Video and Games représente les entreprises leader du secteur du divertissement interactif et audiovisuel au Brésil.

L’Entertainment Software Association (ESA), agit au nom des grands éditeurs aux États-Unis ; ce syndicat professionnel est l’organisateur de l’E3 (Electronics Entertainment Expo), le plus important salon dédié aux jeux vidéo et produits associés.

L’Association canadienne du logiciel de divertissement représente les principaux éditeurs de logiciels interactifs du Canada.

L’Interactive Entertainment South Africa (IESA) est chargée de faire du lobbying, de développer la politique et de contribuer à la croissance des secteurs du jeu local, des jeux dits « sérieux », de la simulation, du jeu de société, de la réalité augmentée et de la VR (réalité virtuelle).

L’Interactive Games & Entertainment Association (iGEA) incarne les principaux éditeurs de logiciels de jeux interactifs en Australie et en Nouvelle-Zélande.

L’ISFE, Interactive Software Federation of Europe (fédération européenne des fabricants de consoles de jeu), dont fait partie le SELL, Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs, représente les grands éditeurs de logiciels de jeux interactifs et des associations professionnelles dans 18 pays européens.

La Korea Association of Game Industry (K-GAMES) regroupe 66 entreprises, notamment les principaux éditeurs en Corée représentant plus de 90 % des ventes du secteur des jeux, et bénéficie de liens de coopération grâce à un partenariat officiel avec le gouvernement coréen visant à promouvoir et développer le secteur des jeux dans le pays.

 

Contact France : 
SELL – Anne Sophie Montadier
01 56 90 08 24 / 06 27 55 06 64
as.montadier@sell.fr

News